Il y a certainement autant de nuances de roses que de gris, et sans en faire tout un plat (ou un roman), j’ai eu envie d’en piocher une, plus rose que les autres, parce que celle-ci a une histoire bien particulière.
Il était une fois un homme plein d’imagination, du nom de Ramón Valdosiera, né en 1918,dans la province de Vera Cruz au Mexique. Les fées qui s’étaient penchées sur son berceau lui donnèrent des talents de dessinateur, peintre, illustrateur, caricaturiste, écrivain et … couturier, et lui permirent d’exceller dans ces disciplines jusqu’à l’âge de 99 ans. Ce magnifique parcours aurait suffi à le rendre unique, mais Ramon méritait plus, celui de devenir inoubliable. Il obtint ce passeport pour l’éternité le jour où il inventa le rose mexicain.
C’est à New-York, au prestigieux hôtel Waldorf Astoria que le couturier Ramon présenta en 1949 une de ses collections qui allait défrayer la chronique. Ses modèles avaient une prédominance de rose, celle des bougainvilliers de son pays, celle qui l’avait fasciné lorsqu’il avait parcouru le Mexique afin d’étudier les costumes traditionnels pour inspirer les lignes et les couleurs de ses vêtements. Ce fut un tel coup de foudre qu’un journaliste baptisa ce rose, le « rose mexicain » et que le Président du Mexique de l’époque utilisa ensuite cette couleur pour promouvoir le Mexique dans le monde.
Dans son pays d’origine, il est intrinsèquement associé, depuis la nuit des temps, au jus des figues de Barbarie, aux jouets des enfants, aux bonbons en sucre, aux chemises brodées des indiennes, aux banderoles de papier découpé qui traversent les rues et aux façades des maisons.
Les grands architectes contemporains mexicains tel Luis Barragan ou Ricardo Legorreta l’ont magnifié dans la pureté de leurs pans de murs si sobres mais tellement roses qu’ils en deviennent une évidence.
Le rose mexicain est unique et omniprésent au Mexique. Il est le contrepoint du bleu du ciel, le révélateur du vert des cactus et des palmiers, le complément de l’orange des pétales de « cempasuchil », cette fleur qui inonde les cimetières le jour des morts.
Il est surtout un éclat de rire du quotidien qui explose au coin d’une rue comme un fruit trop mur. Merci Monsieur Ramon Valdosiera pour l’avoir sorti de l’anonymat. En le nommant, vous en avez fait une ode à la vie.
Texte de Claudia Gillet-Meyer et photos de Régis Meyer.
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